Coca-Cola, ou la boisson dont la recette secrète est mieux protégée que de nombreux programmes nucléaires. Un homme, pourtant, a eu accès à cette formule : le Rav Tuvia Geffen. C’est lui qui a décrété le Coca-Cola casher. Figure de la communauté orthodoxe, Tuvia Geffen a mis ses compétences au service du maintien des relations avec le monde séculier. Né en Lituanie en 1870, il émigre aux Etats-Unis en 1903. D’abord New York, puis Canton (Ohio) en 1907 et enfin Atlanta en 1910.
Au début des années 1930, sa fille Helen, qui étudie la chimie alimentaire à l’Université de Georgie, décide, dans le cadre d’un projet d’études, d’analyser les composants du Coca-Cola. Elle découvre que la boisson contient une glycérine dérivée de gras animal. A l’époque, certains rabbins locaux avaient déjà accordé un certificat de casherout au Coca-Cola. Deux possibilités : soit les rabbins n’étaient pas au courant de la présence de cette glycérine d’origine animale, soit ils avaient appliqué la règle dite des “soixantièmes” (batel be shishim) : si une substance représente moins de 1/60e du produit, elle est considérée comme nulle.
“Quand mon père a appris la présence de cette glycérine, il n’était pas content”, raconte Adler, la fille d’Hélène. Problème : la règle des 1/60e ne fonctionne que si l’ingrédient est ajouté accidentellement. Or, puisque la glycérine animale non casher est intégrée intentionnellement au Coca-Cola, la boisson devient impropre à une consommation en respect des lois de casherout.
Que faire ? Arrêter de boire du Coca-Cola ? Certainement pas. Le Rav décide alors de prendre les choses en main : il contacte Harold Hirsh, responsable des affaires juridiques de Coca-Cola par chance membre éminent de la communauté juive d’Atlanta et lui a fait part de sa découverte. Hirsh s’entretient avec Asa Candler, fondateur et propriétaire de Coca-Cola.
Bien avant que les mots “mondialisation” et “multinationale” ne soient inventés, Candler voulait une consommation de Coca-Cola partout dans le monde. Apprenant qu’un groupe de personnes (les Juifs) ne peuvent plus consommer son soda, il se met dans tous ses états : “Comment ! Il y a des gens que ne peuvent pas boire du Coca-Cola ? Je veux que tout le monde puisse boire du Coca-Cola. Faites quelque chose pour changer ça.”
Le rav Geffen va alors rencontrer des cadres de l’entreprise, qui vont lui communiquer la formule secrète. Et la société va accepter de substituer la glycérine animale par un autre ingrédient. Idem pour une substance à base de maïs qui va, elle aussi, disparaître de la composition. Ainsi, le Coca-Cola est devenu non seulement casher, mais aussi casher pour Pessah. Validé par le hekhsher (autorisation officielle rabbinique) du rav Geffen.
Mais Tuvia Geffen est un peu plus que “rabbi Coca-Cola”. Outre son succès avec la célèbre boisson, il s’est illustré sur de nombreux plans. Il a notamment travaillé pour l’établissement de normes de casherout, pour la formation des shohatim (abatteurs rituels) et de bouchers casher. Il a également tenu une école juive à son domicile jusqu’à ce qu’un établissement communautaire soit établi en 1913. En outre, Geffen a travaillé activement pour l’amélioration du sort des prisonniers juifs ou encore pour la cause des agounot – ces femmes en attente du ghet, divorce religieux – réussissant souvent à localiser les époux et à obtenir séparation officielle.
Entre 1924 et 1961, le Rav Geffen a publié sept livres en hébreu, en yiddish et en anglais. Il est aussi l’auteur de textes midrachiques, de poèmes, de pilpoulim (disputes) et teshouvot (réponses), ainsi que de nombreux articles de recherche.—
Source: JPost (Copyrights) - En Français.
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